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Inenteur de “l’essentialisme”
SAN-YU
peintre chinois de Montparnasse
ne peint ni en français ni en chinois

La peinture européenne est comme un riche festin où il y a des rôtis des fritures, toutes sortes de viandes de forme et de couleur variées. Quant à mes toiles, si vous voulez, ce sont des légumes et des fruits, des salades aussi, qui peuvent servir à vous reposer de vos goûts habituels en peinture...

Ainsi parle San-Yu, peintre chinois qui expose actuellement au Club féminin de Paris. San-Yu est un petit homme au regard agile et au sourire teinté d’humour. Du reste, l’humour parait être le ressort principal de cet homme qui est à la fois l’inventeur du ping-tennis (jeu très à la mode il y a quelques années) et l’auteur de ces subtiles peintures de femmes roses ou d’animaux isolés au milieu d’espaces vertigineux.

Un curieux pourrait se demander si San-Yu est un Chinois qui est peintre ou un peintre qui est chinois. La question est insoluble. Le propre de cet artiste est d’unir dans la peinture l’Orient et l’Occident, non pas dans un amalgame confus et sacrilège, mais dans une espèce de sublimation où se perdent les points de repère habituels. San-Yu a trouvé un mot pour définir cet art si dépouillé (et dans le dessin sommaire, et dans la couleur réduite à trois tons) : le « simplicisme ». D’aucuns ont substitué à ce mot, un peu maladroit peut-être, celui d’« essentialisme » qui ne dit pas plus mais qui permettra aux snobs de le compartimenter à côté d’autres clans, sectes ou chapelles en « isme ».

A l’égard de la peinture moderne, San-Yu professe une opinion particulière : « La façon de peindre des modernes, dit-il, est une certaine façon de tricher avec les couleurs ; je ne triche pas ; je ne puis donc être un peintre comme on l’entend de nos jours... » Ce qui ne l’empêche nullement d’afficher à l’égard de Picasso une admiration sincère : « Picasso est devenu très populaire, mais on n’a rien compris à ses œuvres. La déformation dans sa peinture est simplement un premier pas : notre race est trop vielle, notre corps trop fragile, notre vie trop courte... À l’apparition du chemin de fer, on était effrayé par ce phénomène nouveau. On pensait devoir bâtir des remparts le long des voies ferrées : il en est de même de Picasso. N’élevons pas de remparts autour de Picasso... »

[Translation]

Inventor of “essentialism”
SAN-YU
Chinese painter from Montparnasse
Neither paints in French nor in Chinese

European painting is like a rich feast where there are roast meats, fried foods, all sorts of forms and colors of meat. As for my works, if you like, they are the vegetables and fruit salads which also can help you to put aside to rest your usual tastes in painting.

Thus speaks San-Yu, a Chinese painter who is currently exhibiting at the Paris Club Feminin. San-Yu is slight with a quick regard and a smile tinged with humor. For the rest, humor seems to be the principal resource of this man who is both inventor of the ping-tennis (a game very fashionable for some years now) and creator of these subtle paintings of pink women and animals alone in vast dizzying space.

The curious could ask if San-Yu is a Chinese who is an artist or an artist who is Chinese. There is no answer to this question. The particular gift of this artist is to unite East and West in his painting, not in a confused sacrilegious hotchpotch, but in a sublime form where one loses usual points of reference. San-Yu has found a word to define this art so denuded (and in his minimal drawings, and in his color reduced to three tones): the “Simplicism”. There are some (people) who have substituted, perhaps a little clumsily, the word “essentialism” which does not further elucidate but allows the snobs to differentiate it from other groups, sects, or cliques of “isms”.

Concerning modern art, San-Yu expresses a individual opinion: “The way contemporary artists paint, is a type of deception using color; I do not deceive; so I cannot be a painter like those talked about today…” That does not stop him from having a sincere admiration for Picasso. “Picasso has become well-known, but we do not understand his works; the deformation seen in his works is simply a first step; our race is too old, our bodies too fragile; our life too short… With the arrival of the railroad, we were frightened by this new phenomenon. We thought that we would have to build barriers along the steel rails; it is the same with Picasso. Let us not erect barriers around Picasso.”

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